Le
roux est une base de cuisine des plus classiques. Matière grasse dans un
recipient à petit feu, farine, et tourner attentivement avec un outil en bois
ou en silicone jusqu’à ce que le mélange prenne une belle couleur dorée.
Dans
le cas qui nous occupe, Roux est le nom de famille de Serge Roux, styliste
culinaire dont vous avez vu les créations á la télé dans bon nombre de pubs.
Le
milieu cinéma, et plus spécialement celui du cinéma publicitaire, n’est pas
précisément un havre d’humilité. Presque tout le monde s’y considère
exceptionnel, spécial et bien au dessus du reste des habitant de la planète.
Pour
cette raison, entre autres, Serge Roux est un « rara avis », un
personnage qui démonte les idées préconçues à force de normalité, de naturel et
d’un charme absolumment spontané et vrai qui le situe au delà des schémas
habituels.
Du
point de vue professionnel c’est un des meilleurs dans son métier, qui consiste
à créer des images appétissantes de mets, denrées et produits alimentaires que
le spectateur va vouloir avaler de suite.
Son
équipe est remarquable. Elyssa Roux –sa soeur ou sa cousine, allez savoir-
jeune fille dont le sourire permanent fait craquer l’ambiance généralement
tendue des plateaux, est une très efficace collaboratrice, attentive aux gestes,
décisions et ordres de son aîné et patron. L’autre pilier de l’équipe est le
directeur photo, qui était quand je les ai connus Jean Poisson, un personnage
calme aux silences expressifs qu’il renforce d’un langage gestuel clair et précis.
Une
méchante équipe, je vous l’assure.
Avec
les mots justes, les gestes indispensables et la modestie des génies, les trois
font dans le chocolat, la sauce tomate, le hamburguer, le fromage ou le
saucisson premier choix, arrivant à des résultats qui ne peuvent
qu’émerveiller.
En
plus de sa facette de « food stylist », le petit groupe double la
performance avec des effets spéciaux mijotés à la maison. Des appareils conçus,
construits et maniés par Serge pour que les différents ingrédients d’un plat
arrivent en volant ou le verre de vin atterrisse sans dommage entre deux
assiettes ou le café que prend monsieur Clooney joue les danseurs en forme de
goutte d’une esthétique rare.
Les
Roux apparaissent dans le chaos organisé du tournage avec une valise en rouge
délavé où ils transportent les outils qui vont opérer le miracle, l’accent
parigod et l’apparente naïveté de leur sympathie bon enfant. Du tout simple. Du
vrai.
Après,
tout tourne autour d’eux. Les électriciens, les monteurs, l’équipe de
production et les clients –une dizaine de jeunes inexpressifs dans la trentaine désabusée- et
le personnel auxiliaire, les assistants, les « runners » et autres
petits métiers de ce monde en vase clos.
On
peut lire le scepticisme dans leurs regards quand Serge tend des fils en nylon
ou déballe des aiguilles-à-coudre ou fait des essais pour déceler les erreurs,
qu’il corrige pour recommencer et faire que l’éclaboussement du verre de Coca
tombe du bon côté.
Dix
ou douze ou quinze heures après leur arrivée le groupe sauvage des Roux remplit
de nouveau la malle de son techno-barda et quitte les lieux en saluant, le sourire aux lèvres, tous
ceux qui avons eu la chance de les connaître.
Une
très bonne leçon d’humilité, je vous l’assure.
Pierre
Roca
Serge
Roux
www.foodroux.fr
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